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LE LEGS EN SUBSTITUTION ou en USUFRUIT

12 juin 2019

Une famille reconstituée

Vos enfants proviennent d’une première union. Si vous décédiez, vous aimeriez à la fois assurer une sécurité à votre conjoint(e) et un héritage à vos enfants. Comment faire en sorte que ce capital revienne à vos enfants suite au décès de votre conjoint(e) tout en lui permettant d’en profiter de son vivant ?

Les outils juridiques

Vous pourriez faire un legs en fiducie testamentaire. Cependant il vous faudrait désigner un fiduciaire impartial qui ne soit pas directement ou indirectement bénéficiaire de cette fiducie. Trouver la bonne personne à ce titre n’est pas facile, car elle sera impliquée comme administrateur, pendant toute la durée de la fiducie.

Ou encore, vous pourriez léguer tous vos biens à votre conjoint(e) en substitution, c’est-à-dire, à charge d’en remettre une partie ou la totalité à vos enfants à son décès. La substitution peut être ‘entière’ ou partielle. Si elle impose au légataire de remettre 100% du capital aux enfants, à son décès, il s’agit d’une substitution fidéicommissaire. Si elle ne l’oblige qu’à remettre le résidu du capital à son décès, c’est une substitution de residuo. La première interdit à votre conjoint(e) d’entamer le capital de son vivant. La deuxième le lui permet, en tout ou en partie, dépendamment des directives contenues dans votre testament. Il est toutefois possible de moduler la substitution fidéicommissaire, en stipulant par exemple que seulement 50% de votre capital y serait soumis, alors que le reste serait légué en pleine propriété à votre conjoint(e), sans aucune contrainte.

Le legs en substitution ne commande pas de nomination d’un fiduciaire impartial (un co-administrateur non bénéficiaire), comme dans le cas de la fiducie. Cependant, ce n’est pas un  patrimoine distinct de celui du bénéficiaire (votre conjoint(e). Ce patrimoine ne serait pas à l’abri de ses créanciers personnels. Alors qu’en fiducie testamentaire, il y a protection contre ses créanciers, car il s’agit alors d’un patrimoine séparé et autonome.

Sécuriser l’administration

Il serait tout de même prudent de désigner un co-admimistrateur pour surveiller la gestion des biens laissés en substitution ou encore de nommer une personne à qui votre conjoint(e) devrait faire annuellement une reddition de compte. Cela viendrait sécuriser la transmission éventuelle du capital à vos enfants, au décès du conjoint.

Une autre alternative

L’usufruit constitue une autre voie pour arriver à vos fins. Vous léguez la propriété du capital à vos enfants (les nus-propriétaires),  et l’usufruit à votre conjoint(e) (l’usufruitier), sa vie durant. Ainsi, les revenus d’intérêt lui seront versés jusqu’à son décès, et le capital sera immobilisé à ces fins et vos enfants  n’y auront accès qu’au décès de votre conjoint(e). Un inventaire (bilan successoral) sera dressé lors du règlement de votre succession afin de bien établir le  capital destiné éventuellement aux enfants. Comme dans la substitution, votre conjoint(e) est désigné(e) l’administrateur du capital. La prudence commanderait de désigner un co-administrateur (idéalement parmi les enfants s’ils sont majeurs ou dès qu’ils le deviendront). Vous pourriez moduler également cet usufruit en précisant que seulement un pourcentage de votre capital y serait assujetti. Le résidu serait  transféré en pleine propriété à votre conjoint(e).

C’est trop compliqué ?

Beaucoup plus simple : si votre âge et votre santé le permettent, contractez une bonne assurance-vie en faveur de vos enfants pour leur laisser un bon capital et léguez tous vos biens en pleine propriété à votre conjoint(e). Tout le monde sera satisfait et votre conjoint(e) n’aura pas à régler votre succession avec et pour d’autres personnes, ni à administrer un capital qui légalement ne lui serait pas dévolu.

Familles reconstituées obligent…

Jean Martel notaire, mba, D.fisc., conseiller juridique.

 

 

6 commentaires

  1. Commentaire par Jean-Francois le 23 juillet 2020 à 21 h 15 min

    Dans le cas de la substitution, lors du décès, le grevé pourrait il rouler les FEER et REER dans son patrimoine afin d’éviter de payer les impôts et ainsi reporter les impôts au moment du décès du grevé ?

  2. Commentaire par Jean Martel le 25 août 2020 à 10 h 00 min

    Veuillez excuser le délai….j’étais en vacances pour un mois. En vertu du code civil du Québec, le légataire en substitution est réputé pleinement propriétaire des biens légués. Partant de cela, on pourrait dire que oui le reer serait transféré par roulement. Cependant, en vertu de la fiscalité, une substitution est considérée comme une fiducie. Or, c’est impossible de léguer un reer en fiducie, tel reer étant déjà détenu par un fiduciaire administrateur. De plus, les lois fiscales édictent que pour qu’un roulement reer soit admissible, il doit être absolu, donc soumis à aucune condition. Or, le fait qu’il y ait un appelé à la substitution (l’héritier qui recevra les biens après le décès du grevé), pourrait être considéré comme une condition ou une altération à l’absolutisme prescrit. La solution la plus sûre: désigner le conjoint, la conjointe, comme bénéficiaire du reer ou inclure ou testament un legs particulier en pleine propriété, sans condition ni réserve. Merci pour votre question. Jean Martel.

  3. Commentaire par Louise le 28 juillet 2021 à 13 h 12 min

    Nous sommes 3 héritiers d’un condo dont l’usufruit a été laissé à la conjointe de notre défunt père. Le condo nous reviendra soit au décédés dans conjointe soit au moment où elle le quittera. Notre père est décédé depuis 16 ans. Question : lorsque nous prendrons possession du condo, qui était la résidence principal, sur quelle valeur devrons-nous, le cas échéant, déclarer un gain en capital : sur la valeur présumée du condo au moment du décès où la valeur réelle au moment de la vente?
    Merci de l’information que vous pourriez nous fournir

  4. Commentaire par Jean Martel le 16 mars 2022 à 16 h 01 min

    Légalement vous êtes devenus nus-propriétaires au moment du décès de votre père. Il faut vérifier avec ses comptables si le gain en capital exonéré sur résidence principale fut déclaré au moment de son décès.

  5. Commentaire par Jean Martel le 16 mars 2022 à 15 h 57 min

    C’est dans la déclaration de revenu du grevé décédé que le gain en capital doit être déclaré et donc c’est la succession du grevé qui doit payer. Jean Martel notaire

  6. Commentaire par Benoit Auger le 14 décembre 2023 à 14 h 05 min

    Bonjour,

    Dans votre réponse du 25 aout ; vous mentionnez que « La solution la plus sûre: désigner le conjoint, la conjointe, comme bénéficiaire du reer ou inclure ou testament un legs particulier en pleine propriété, sans condition ni réserve » . Selon cette alternative; est-ce exact d’affirmer qu’ il n’y aurait pas de legs en substitution et ainsi le résidu du capital ne reviendrait pas à mes enfants ?

    Au niveau fiscal, le legs en substitution fait-il l’objet d’un impot distinct ?

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