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RENONCIATION À UNE SUCCESSION

17 octobre 2019

Un cas vécu cette semaine:

Trois enfants, deux seulement nommés au testament

Une cliente me consulte en ce mois d’octobre, un peu paniquée. Son père (divorcé) est décédé en mars 2019, laissant un testament, en faveur des deux frères de ma cliente seulement. Elle n’est aucunement désignée à ce document. Ma cliente et ses frères sont les seuls 3 enfants du défunt.

Cette succession s’avère déficitaire. Ses deux frères ont signé une renonciation notariée dans le délai prescrit par le Code civil, soit, dans les 6 mois et 60 jours à compter du décès de leur père, moment où leur droit s’est ouvert. Ils ne seront ainsi aucunement responsables du passif successoral.

Consultation du R.D.P.R.M.  

Ma cliente a appris cela en consultant le registre des droits personnels réels mobiliers (R.D.P.R.M.) en juillet, car les renonciations doivent y être inscrites.

Sa crainte est la suivante : En octobre, le délai de 6 mois et 60 jours, depuis le décès, étant expiré, est-elle tenue responsable des dettes de son père, étant donné que le Code civil édicte qu’un successible qui ne renonce pas à temps est présumé avoir accepté la succession ?

Aucun problème pour elle

Réponse, non, elle n’est pas responsable et peut encore renoncer. Pourquoi ?

L’article 632 du Code civil du Québec stipule : ‘’Le successible a six mois, à compter du jour où son droit s’est ouvert, pour délibérer et exercer son option…’’ (les soulignés sont de nous). Or, le droit de ma cliente s’est ouvert non pas à la date du décès de son père (ce qui était le cas pour ses frères nommés au testament), mais seulement à la date de la dernière renonciation signée par son frère, soit en juillet 2019, moment où ma cliente a connu son état de successible (héritière potentielle).

Une succession testamentaire devenue non testamentaire

En effet, lorsque tous les successibles nommés dans un testament renoncent, le testament n’a plus d’effet et nous nous retrouvons avec une succession ‘ab intestat’ (sans testament applicable), à compter du moment où ce testament n’a plus d’effet. Les règles des successions ab intestat établissent qu’en l’absence de testament, ce sont les enfants qui héritent du défunt (sans épouse successible). Ma cliente est alors devenue successible en vertu de ces règles.

Reste à signer la renonciation notariée

Elle devra (pourra) donc renoncer à temps, dans le délai de 6 mois et 60 jours commençant en juillet 2019. Si elle avait ignoré sa qualité pendant dix ans et qu’aucun tiers connaissait cet état pendant ce délai, elle aurait été présumée avoir renoncé à la succession. Mais c’est connu des tiers, car elle a reçu cette semaine une lettre de la régie des rentes du Québec lui demandant de compléter une demande de prestation de décès (ce qu’elle évitera évidemment de faire).

Une fois cela complété, c’est Revenu Québec (section Curateur public) qui va gérer cette succession déficitaire, sans aucune responsabilité pour les successibles.

Nous aurons éventuellement l’occasion dans un autre article, de traiter d’actes posés par des successibles qui pourraient constituer une acceptation présumée et les priver de leur droit de renoncer.

Merci de m’avoir lu !

Jean Martel notaire, mba, D.fisc., conseiller juridique

 

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